Trois questions à

Olivier Pedro-Jose, porte-parole adjoint du ministère de la Justice, a accepté de nous répondre.

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Pourquoi avoir pris la circulaire du 25 janvier 2013, et comment la situation à cet égard dans les juridictions a-t-elle évolué depuis ? La circulaire de la garde des Sceaux en date du 25 janvier 2013 vise à harmoniser les pratiques des greffiers en chef, compétents pour délivrer les certificats de nationalité française (CNF), lorsque la demande est formée par des parents français pour le compte de leurs enfants nés à l'étranger alors qu'il est soupçonné que les parents ont eu recours à une convention de gestation ou de procréation pour le compte d'autrui. Sans qu'il ne soit question de remettre en cause le principe d'ordre public de prohibition de la gestation pour autrui, cette circulaire a permis de confirmer la possibilité pour les enfants nés à l’étranger d’un parent français et disposant d’un acte d’état civil étranger « probant » justifiant d’un lien de filiation avec ce parent français, d’attester de leur nationalité française au moyen du certificat de nationalité française. Il s'agit ainsi de promouvoir la recherche d’un juste équilibre entre le principe d’ordre public de prohibition de la gestation pour autrui et la nécessaire protection qu’il convient de garantir à l’enfant au nom de son intérêt supérieur au sens de l’article 3, paragraphe 1, de la convention de New York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l’enfant et de son droit à mener une vie familiale normale au sens de l’article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales. Les récentes décisions de la Cour européenne des droits de l'Homme du 26 juin 2014, aux termes desquels la France a été condamnée à la suite du refus de ses autorités de faire droit aux demandes visant à transcrire sur le registre de l’état civil les actes de naissance d’enfants nés à la suite d’une convention de procréation ou de gestation pour le compte d’autrui pratiquée à l’étranger, ont au demeurant confirmé la nécessité de préserver le sort des enfants. La Cour a ainsi rappelé l'obligation pour les États de veiller au droit au respect de l'identité des enfants, dont la nationalité française constitue un aspect essentiel. C'est le sens de la décision du Conseil d'État en date du 12 décembre 2014 ayant rejeté le recours qui avait été intenté contre cette circulaire. Celle-ci, désormais validée, va pouvoir porter ses pleins et entiers effets à l'avenir. En distinguant la situation des parents et de l’enfant, le régime actuel de la gestation pour autrui est complexe. Une évolution vers une simplicité accrue est-elle envisageable ? Aux termes de l’article 16-7 du Code civil, « toute convention portant sur la procréation ou la gestation pour le compte d’autrui est nulle ». Cette disposition est d’ordre public de sorte que toute convention de maternité pour autrui éventuellement conclue serait frappée de nullité. De même, aux termes des articles 227-12 et 227-14 du Code pénal, il est interdit, pour une personne physique ou morale, d’apporter son entremise pour faciliter la réalisation de ces actes illicites. Cet interdit se double de sanctions pénales qui peuvent aller jusqu’à trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende. Le gouvernement souhaite, d'une part, maintenir la prohibition de la gestation pour autrui et, d’autre part, préserver l'intérêt des enfants, qui ne sont nullement responsables de leur mode de conception, fût-il interdit par la loi. Une réforme plus globale du droit de la famille est-elle encore d’actualité, notamment avec la distinction entre la situation du couple et la filiation, comme le conceptualisent par exemple Irène Théry ou Anne-Marie Leroyer ? À travers l'adoption de la loi du 17 mai 2013 ouvrant le mariage aux couples de même sexe, une réforme essentielle du droit de la famille a été portée par le ministère de la Justice. D'autres points pourraient avoir vocation à être modifiés. À cet égard, certaines questions, comme celle de la coparentalité, ont fait l'objet d'un regard attentif de la part du gouvernement si bien que certaines propositions de réforme sont inscrites dans la proposition de loi relative à l'autorité parentale et à l'intérêt de l'enfant en cours de débats au Parlement. Propos recueillis par Pablo Hurlin-Sanchez