La GPA interdit la transcription des actes étrangers

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La circulaire émise par le ministère de la Justice le 25 janvier dernier a pu susciter des interrogations sur la licéité de la transcription dans l’état civil national d’actes de naissance établis dans un pays étranger. La Cour de cassation a, par deux arrêts aux motivations complémentaires, brisé net ce suspens.

Les juges du quai de l’Horloge établissent désormais un lien net entre la prohibition des conventions de gestation pour autrui, ainsi que l’achat d’enfant, et le refus de transcrire un acte de naissance. Aux termes de la loi pourtant, et en particulier de l’article 47 du Code civil, la transcription d’un acte « fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays » est de droit s’il n’est pas établi que « cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ». Comme le soulevaient d’ailleurs les requérants, la seule limite à l’inscription à l’état civil français de leurs enfants semblait être la légalité externe de l’acte.

Les juges du fond avaient accepté ce raisonnement à propos de la convention de gestation pour autrui, pourtant relevée par le ministère public, tout en le refusant dans la seconde espèce.

Par les deux décisions du 13 septembre, la Cour de cassation vide le conflit entre les deux décisions de la cour d’appel de Rennes et explique son raisonnement, qui s’inscrit en droite ligne de sa jurisprudence antérieure.

Depuis la décision de principe du 31 mai 1991 et les lois de bioéthique de 1994 (dont sont issus les articles 16-7 et 16-9 du Code civil visés dans les décisions), « la convention par laquelle une femme s'engage, fût-ce à titre gratuit, à concevoir et à porter un enfant pour l'abandonner à sa naissance contrevient tant au principe d'ordre public de l'indisponibilité du corps humain qu'à celui de l'indisponibilité de l'état des personnes ». Cette disposition fait partie de l’ordre public international français, comme le souligne la Cour de cassation dans un arrêt du 17 décembre 2008.

Dotée d’une telle force, l’interdiction des conventions de gestation pour autrui peut s’étendre plus loin que la simple restriction à la liberté contractuelle, à laquelle les requérants souhaitaient la cantonner. En témoigne le fait que le juge écarte l’application de l’intérêt supérieur de l’enfant tiré de l’article 3, § 1 de la Convention internationale des droits de l’Enfant et du respect de la vie privée et familiale au sens de l’article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales.

Cette interdiction avait déjà été illustrée à plusieurs reprises, en particulier dans un arrêt du 6 avril 2011 concernant la reconnaissance de la paternité et de la maternité par un tribunal du Minnesota (États-Unis d’Amérique). Cet arrêt s’était pourtant limité à ordonner la rectification de la transcription de l’état civil en supprimant la mention reconnaissant l’épouse du père comme mère de l’enfant.

La jurisprudence de 2013 va, à cet égard, bien plus loin car elle qualifie de frauduleuse la transcription d’une naissance résultant d’une convention de gestation pour autrui, ce qui fonde l’annulation de la transcription, ainsi que la reconnaissance paternelle !

Par cette décision, les juges ne remettent pas fondamentalement en cause la possibilité pour des parents de conclure des conventions de gestation pour autrui à l’étranger, car, comme le reconnaissait d’ailleurs la Cour de cassation en 2011, l’absence de transcription, d’ailleurs facultative, « ne prive pas l'enfant de sa filiation paternelle, ni de la filiation maternelle que le droit de l'État du Minnesota lui reconnaît, ni ne l'empêche de vivre avec les époux X… en France ». De plus, et comme le demandait la circulaire du 23 janvier 2013, l’absence de transcription ne constitue pas un obstacle en soi à la délivrance d’un certificat de nationalité française.

Pour les services consulaires, la meilleure solution, tant du point de vue du respect de l’ordre international public comme du respect du droit des personnes, reste de transcrire les actes, et de ne transmettre au procureur de la République que les cas les plus flagrants de fraude.

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