Mariage entre une femme et son beau-père : validation de circonstance mais maintien du principe de prohibition

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« Se marier avec un ascendant ou un descendant par alliance, est-ce enfreindre le tabou ultime ? », s’interrogeait La Lettre Légibase État civil du 2 décembre 2013, à propos du mariage d’une femme avec le père de son premier époux, ce dernier le remettant en cause et demandant son annulation, à la mort de son père, quelque 22 ans après sa célébration, le 17 septembre 1983.

Histoire peu banale qui aboutit dans un premier temps à une invalidation dudit mariage par le tribunal de grande instance de Grasse, décision fondée sur l’article 161 du Code civil qui interdit le mariage « entre tous les ascendants et descendants et les alliés dans la même ligne ». Décision confirmée par la cour d’appel d’Aix-en-Provence, le 21 juin 2012.Ce que n’admit pas l’ex-femme du premier mari, devenue sa belle-mère, qui remit l’affaire entre les mains des juges de la première chambre civile de la Cour de cassation, lesquels ont décidé, le 4 décembre dernier, de valider l’union, tout en limitant leur décision « au cas particulier examiné », autrement dit, sans remettre en cause le principe de la prohibition du mariage entre alliés. Pour s’opposer à l’annulation de son mariage, l’épouse, devenue veuve, et avec la qualité de légataire universelle, avait invoqué une « atteinte à la substance du droit au mariage garanti par l’article 12 de la Convention de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, en se fondant sur un arrêt rendu en ce sens le 13 septembre 2005 par la Cour européenne des droits de l’Homme, relatif à un projet de mariage entre alliés, se prévalant de nombreuses années de vie commune ». Argumentaire non suivi par les juges du fond, qui ont retenu les dispositions de l’article 161 du Code civil, considérant par ailleurs que « certes, ainsi que le rappelle la Cour européenne des droits de l’Homme dans un arrêt récent, les limitations apportées au droit du mariage par les lois nationales des États signataires ne doivent pas restreindre ou réduire ce droit d’une manière telle que l’on porte atteinte à l’essence même de ce droit ; que cependant, la restriction apportée au mariage entre un beau-père et sa bru est destinée à la sauvegarde de l’homogénéité de la famille, […] que cette interdiction permet également de préserver les enfants, […] qu’ainsi, l’empêchement à mariage entre un beau-père et sa bru est justifié en ce qu’il répond à des finalités légitimes ». Le tout assorti de considérations relatives aux conséquences de ce mariage sur la fille de l’épouse âgée de dix ans, évoquant notamment « une regrettable confusion entre son père et son grand-père », et à celles, préjudiciables, quant aux droits successoraux du premier époux… Constatations que la Cour de cassation a jugé insuffisantes pour représenter, à l’égard de l’épouse, « une ingérence injustifiée dans l’exercice de son droit au respect de sa vie privée et familiale dès lors que cette union, célébrée sans opposition, avait duré plus de vingt ans ». D’où sa décision de casser l’arrêt de nullité de la cour d’appel, « mais seulement en sa disposition prononçant l’annulation du mariage célébré le 17 septembre 1983 ». Autrement dit, prend-elle le soin de préciser dans un communiqué : « En raison de son fondement, la portée de cette décision est limitée au cas particulier examiné. Le principe de la prohibition du mariage entre alliés n’est pas remis en question. » Sources :

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